[Critique cinéma] Elle l’adore

Imaginez qu’un jour le chanteur dont vous êtes le plus fan vienne toquer à votre porte pour vous demander un service complètement fou. C’est l’histoire que nous raconte Elle l’adore, premier film encourageant de Jeanne Herry.

Le film nous présente dans un premier temps Muriel (Sandrine Kiberlain), une esthéticienne, bavarde, qui a une vie tellement plate qu’elle n’hésite pas à mentir et raconter des anecdotes plus ahurissantes les unes que les autres pour susciter l’intérêt de ses proches. Sandrine Kiberlain qui interprète cette groupie du pianiste, est une fois de plus d’une justesse remarquable. Elle qui nous avait déjà montré qu’elle était capable de jouer la comédie dans 9 mois ferme (César de la meilleur actrice) nous prouve ici qu’elle peut jouer sur deux registres à la fois: la comédie et le drame. Elle donne une certaine dimension à ce personnage d’apparence inintéressant qui va au fil du film évoluer et nous montrer finalement une femme très forte.

Les premières minutes du film nous montrent donc à quel point Muriel est une menteuse. Mais notre esthéticienne n’est pas qu’une mythomane, elle est aussi depuis 20 ans la plus grande fan du chanteur à succès Vincent Lacroix (Laurent Lafitte). Elle est à chacun de ses concerts, à toutes ses émissions, et collectionne tout ce qui est en rapport avec lui. Une fan quoi. Mais lorsqu’une nuit, Vincent son idole de toujours sonne à sa porte, sa vie va basculer. Elle se retrouve dans une histoire qu’elle même n’aurait pas pu inventer. Ainsi, Vincent Lacroix lors d’une violente dispute avec sa femme la tue accidentellement en la repoussant. Ironie du sort c’est une statuette des victoires de la musique qui va ouvrir le crâne de Julie, sa femme. Non seulement c’est sa vie de musicien qui est à l’origine de cette dispute, mais en plus de cela c’est carrément l’un des prix de sa carrière qui va être à l’origine de la mort. Il n’y a pas à dire, la musique de Vincent Lacroix est mortelle. Bref, hors de question pour Vincent d’appeler la police. Il décide alors de demander à Muriel, sa plus grande fan, de faire disparaître le corps. Mais ça ne sera pas aussi simple que ça.

Laurent Lafitte qui interprète ce chanteur, essaye de nous faire oublier ces rôles comiques pour nous démontrer qu’il est capable de jouer des rôles plus sombres. C’est à moitié réussi, si l’acteur arrive à nous faire croire à son personnage, il manque quelque chose pour lui donner encore plus d’ampleur. Là on se retrouve devant un beau salaud qui n’a aucun remord, qui n’a que pour seul peur de perdre sa carrière. Le problème vient peut-être de l’écriture, on aurait pu s’attendre à un personnage encore plus torturé entre son crime, la perte de sa femme, et sa carrière. Mais dans l’ensemble, le jeu d’acteur est très bon. C’est d’ailleurs ce qui fait la force du film car l’intrigue en elle même patine un peu.

Jeanne Herry, la réalisatrice, semble ne pas savoir si il faut se focaliser sur les personnages ou sur l’intrigue. On se retrouve donc avec un film qui d’une part à du mal à sonder les zones d’ombre de ses personnages principaux et au contraire s’épanche un peu trop sur les secondaires, et d’autre part une intrigue qui n’est pas assez creusée même si elle nous tient en haleine tout du long. C’est dommage car le film est un beau mélange de genre passant de la comédie au polar pur, dévoilant une Sandrine Kiberlain géniale en fanatique prête à n’importe quel mensonge pour s’en sortir et aider ce chanteur qu’elle aime et qu’elle adore. Côté réalisation, c’est assez plat et sa manque d’une vraie patte. La réalisatrice se contente de filmer cette histoire de façon assez banale, on remarquera cependant une envie de filmer souvent les acteurs en plan serré pour nous faire ressentir leur oppression. Ça fonctionne.

Au final, on se retrouve devant un premier film maîtrisé qui navigue entre comédie et polar et qui doit surtout son succès au duo convainquant formé par Sandrine Kiberlain et Laurent Lafitte. Elle l’adore ? Nous aussi.

Article rédigé par Matt pour Conso-Mag

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